Dans une
lettre et un rapport dont LEXPRESS.fr et France Info ont eu connaissance, Reza
Pahlavi, le fils du dernier chah d'Iran, demande au Conseil de sécurité de
l'ONU de saisir la Cour pénale internationale pour poursuivre le Guide suprême,
l'ayatollah Ali Khamenei.
Reza
Pahlavi, le fils du dernier chah d'Iran renversé par la révolution islamique de 1979, a tenu
promesse : en décembre, il s'était engagé à finaliser une lettre et un dossier
sur lesviolations des droits de l'homme dans son pays, et à envoyer
l'ensemble aux membres du Conseil de sécurité de l'ONU. C'est désormais chose
faite : ces documents, dont LEXPRESS et France Info ont eu connaissance en
exclusivité, sont adressés aujourd'hui aux chefs d'états concernés, parmi
lesquels Nicolas Sarkozy.
Cette
démarche s'inscrit dans le cadre du combat mené par Reza Pahlavi contre les leaders du régime,
en particulier le Guide suprême, Ali Khamenei. M. Pahlavi, âgé de 51 ans,
souhaiterait que Khamenei soit poursuivi pour crimes contre l'humanité au sens
de l'article 7 du Statut de Rome. Dans sa lettre, il appelle les pays membres
du Conseil à saisir le procureur de la Cour pénale internationale (CPI) afin
qu'il puisse ouvrir une enquête. Il dénonce la " réélection frauduleuse
" du président Mahmoud Ahmadinejad en juin 2009 et accuse Ali Khamenei -
son supérieur dans la structure du pouvoir en Iran - d'être le "principal
responsable de tous les crimes commis contre les citoyens iraniens".
L'Iran n'a
pas ratifié le statut de Rome, fondement juridique de la CPI. Celle-ci ne peut
inculper un individu que si les crimes en question ont été commis sur le
territoire d'un Etat partie ou s'il est ressortissant d'un Etat partie. Mais
une enquête peut être ouverte par le procureur à la demande d'un Etat partie ou
de sa propre initiative. Le Conseil de sécurité de l'ONU peut également charger
le procureur d'enquêter. Dans ce cas, la juridiction de la CPI peut s'étendre à
un Etat non partie au Statut de Rome, comme ce fut le cas pour la Côte d'Ivoire
et la Libye en 2011.
"Pas
un manifeste politique", "un acte de nature judiciaire"
Reza
Pahlavi, qui vit en exil depuis 33 ans et partage son temps entre paris et
Washington, bénéficie d'une assise politique très limitée dans son pays. Mais
sa voix est encore audible à l'étranger. D'où cette démarche auprès du Conseil
de sécurité. Pour l'appuyer, il transmet aux pays concernés un rapport de 41
pages intitulé "Crimes contre l'humanité en Iran", dans lequel il se
dit porteur, avec certains de ses compatriotes, d'un "projet
démocratique".
Ce document,
présenté comme "le fruit d'un travail mené avec des avocats et des
défenseurs des droits de l'homme", revient d'abord sur l'élection présidentielle de 2009 et les manifestations qui ont
suivi. Ses auteurs dressent ensuite une longue liste d'incidents,
d'arrestations, de scènes de viol ou de tortures. La plupart des faits
mentionnés - plusieurs dizaines au total - sont datés et localisés. Les noms
des victimes apparaissent noir sur blanc. "Ce texte n'est pas un manifeste
politique mais un acte de nature judiciaire", insiste Me Emmanuel Daoud,
l'avocat français de Reza Pahlavi.
Il ne
peut y avoir de justice pénale internationale à deux vitesses
D'après les
auteurs du rapport, "les dirigeants de la République islamique ont
introduit le viol dans leur arsenal de torture". Pour Reza Pahlavi et ceux
qui l'ont aidé à collecter ces informations, "l'ensemble des traitements
inhumains contre les prisonniers politiques est le résultat d'un plan élaboré
au niveau national".
Ils
annoncent d'ores et déjà qu'un autre rapport, actuellement en préparation,
complètera celui-ci et "apportera davantage d'éléments confirmant
l'implication des dirigeants de la République islamique". Pour Me Daoud,
"il ne peut y avoir de justice pénale internationales à deux
vitesses", et rien n'empêche, du moins en théorie, les membres du conseil
de sécurité d'agir avec l'Iran comme ils l'ont fait avec la Libye ou la Côte d'Ivoire.