L'ambassadeur
des Etats-Unis met en garde contre la fragilité du pouvoir chinois. Un langage
pas vraiment diplomatique qui a de quoi inquiéter.
- Des
soldats chinois. REUTERS/Reinhard Krause. -
Le
Parti communiste chinois suscite chez le peuple de Chine un sentiment de
frustration croissant et la situation politique y est «très, très
délicate» a affirmé, mercredi 18 janvier, Gary Locke, ambassadeur
américain en Chine.
«Je crois
fermement qu’il existe un pouvoir du peuple, et le peuple se sent de plus en
plus frustré par les agissements du gouvernement, la corruption, le manque de
transparence et les problèmes qui les affectent au quotidien et dont ils ont le
sentiment qu’ils sont négligés»,a expliqué Locke à Steve Inskeep de la radio NPR, au cours
d’uneinterview qui
s’inscrit dans un bombardement médiatique conduit pendant sa visite à
Washington.
«Pensez-vous
que la situation soit fondamentalement stable en Chine à l’heure actuelle?», lui a demandé Inskeep.
«Elle est
très délicate il me semble—très, très délicate», a répondu Locke. «Mais
au début de l’année, il y a eu des appels à une révolution de Jasmin et ils
n’ont rien donné. Je crois qu’il faudrait quelque chose de très significatif,
d’interne à la Chine, pour provoquer un quelconque soulèvement majeur.»
Des
manifestations permanentes dans tout le pays
Locke a
expliqué que depuis qu’il a succédé à l’ancien candidat à la primaire
républicaine Jon Huntsman au poste d’ambassadeur, il s’est rendu compte de
l’existence de manifestations, petites et grandes, dans toute la Chine,
organisées par des Chinois ordinaires pour faire pression sur le gouvernement
afin qu’il s’occupe de leurs problèmes. Il a cité l’exemple d’une récente
manifestation dans la ville méridionale de Wukan, déclenchée en réaction à la
confiscation de terres sans compensation raisonnable.
«Les
habitants ont en fait empêché toute personne de l’extérieur d’entrer,
provoquant l’arrêt de la ville, et ont obligé les dirigeants communistes du
gouvernement chinois à envoyer des gens pour s’occuper de leurs doléances», a rapporté Locke.
La discorde
qui règne en Chine est en partie la conséquence de la disparité de richesses et
de revenus entre la classe moyenne croissante et les masses de Chinois pauvres
et ruraux, a expliqué Locke. Il a également déclaré que le gouvernement chinois
respectait de moins en moins les droits de l'homme.
Des
droits de l'homme de plus en plus bafoués
«Il
apparaît très clairement que dans la dernière ligne droite avant les Jeux
olympiques de Pékin de 2008 et depuis, la dissidence a été beaucoup moins
tolérée —et que le respect des droits humains en Chine ne va pas dans la bonne
direction», a
déploré Locke.
Interrogée
sur le sujet lors de la conférence de presse du Département d’État du mercredi
18 janvier, la porte-parole Victoria Nuland a confirmé les commentaires de
Locke sur le non-respect des droits de l'homme et l’état de droit en Chine.
«[Locke]
parle de toute évidence au nom de l’administration [américaine] lorsqu’il
exprime une inquiétude constante devant ce qu’il nous semble être une tendance
à la hausse des mesures de répression, des disparitions forcées, des détentions
extrajudiciaires, des arrestations et des condamnations d’activistes des droits
de l’homme, d’avocats, de chefs religieux et de minorités ethniques en Chine», a-t-elle affirmé.
Nuland a
cependant refusé de répéter l’affirmation de Locke selon laquelle le
gouvernement chinois serait potentiellement instable.
«Je crois
que notre message au gouvernement chinois sur ces questions est le même que
celui que nous envoyons n’importe où dans le monde quand nous éprouvons des
inquiétudes quant au respect des droits de l'homme, c’est-à-dire que les
gouvernements sont plus forts quand ils protègent les droits de leurs peuples
et lorsqu’ils autorisent une dissidence pacifique», a-t-elle déclaré.
Josh
Rogin
Traduit par
Bérengère Viennot