Lundi, le
Journal de l'Association médicale canadienne a proposé d'interdire aux médecins
de révéler le sexe du futur enfant avant la 30e semaine de grossesse. Une
mesure qui permettrait d'éviter l'avortement des foetus féminins fréquent dans
certaines communautés.
Si
l'avortement suscite encore aujourd'hui de nombreux débats, c'est une pratique
particulière que leCanada met
aujourd'hui en évidence : le foeticide en fonction du sexe. De récentes
recherches ont en effet révélé que certaines communautés d'origine indienne,
chinoise, coréenne, vietnamienne ou encore philippine pratiquaient une sorte de
"sélection" à la naissance. Autrement dit, des femmes se font
régulièrement avortées parce qu'elles attendent une fille et qu'elles
auraient souhaité un garçon.
Ce genre de
foeticide "touche des millions d'individus en Inde et en Chine",
mais le fait qu'il soit beaucoup plus rare en Amérique du Nord, "n'est
pas une raison pour l'ignorer", écrit le rédacteur en chef du Journal
de l'Association médicale canadienne (CMAJ), le Dr Rajendra Kale. Après une
échographie, "de nombreux couples qui ont deux filles et pas de fils se
débarrassent sélectivement de foetus féminins jusqu'à ce qu'ils soient sûrs que
leur troisième enfant est un garçon", ajoute le médecin né à Bombay.
Selon une
recherche portant sur 65 femmes d'origine indienne aux Etats-Unis, 40% d'entre
elles avaient interrompu des grossesses alors qu'elles portaient un foetus
féminin. Interrogé par l'AFP, le Dr Kale a ainsi estimé le nombre d'avortements
motivés par le sexe du foetus à "quelques centaines par an" au
Canada. "Si le Canada est incapable de contrôler cette pratique
répugnante, quel espoir peut-on avoir en Inde et en Chine ?", a ajouté
le médecin, insistant sur le fait que l'information sur le sexe du foetus est
"médicalement sans importance". D'où la proposition qu'il a
faite.
Rajendra
Kale suggère d'interdire de révéler le sexe du foetus avant la 30e semaine de grossesse, date à
laquelle un avortement légal est pratiquement impossible dans la plupart des
pays. C'est "un prix modeste à payer pour sauver des milliers de filles
au Canada", souligne le médecin, qui ne réclame pas une loi mais une
décision de tous les "collèges" provinciaux, organismes
professionnels des praticiens.
Des
réactions partagées
Au Canada et
aux Etats-Unis, de organisations de femme ont réagi avec prudence à cette
proposition. Elles estiment ainsi qu'il faudrait plutôt trouver un autre moyen
de combattre le phénomène, soulignant que des forces conservatrices dans les
deux pays utilisent cette question pour limiter le droit à l'avortement. Ainsi,
Alexia Conradi, présidente de la Fédération des Femmes du Québec, a jugé
inacceptable la sélection selon le sexe. Mais selon elle, "il faut se
demander si le fait de ne pas donner l'information est une bonne chose quand ce
genre de question est posé par les conservateurs aux Etats-Unis et au Canada
dans le but de faire tranquillement reculer le droit à
l'avortement".
Du côté des
anti-avortement, la vice-présidente de REAL Women of Canada, Gwendolyn Landolt,
s'est dite quant à elle favorable à une telle interdiction, demandant : "connaître
le sexe d'un enfant est-ce un droit, si cette information est utilisée pour le
tuer ?"
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