Les
contrôles sanitaires prévus pour ces produits par la réglementation européenne
sont moins exigeants que ceux appliqués aux médicaments.
Les injections
à des fins cosmétiques fourniront-elles le scénario du prochain
désastre sanitaire? C'est en tout cas l'avis du quotidien britannique,The
Timesde mardi. Les Anglais découvrent avec angoisse que plus de 160
produits de comblement des rides du
visage (type collagène, acide
hyaluronique… à l'exception des médicaments type Botox) sont approuvés à la
vente sur leur territoire avec des exigences médicales moins fortes que celles
des médicaments.
Considérés
comme des dispositifs médicaux, ces produits sont en effet soumis à une
réglementation qui fait la part belle au marquage CE. Or ce dernier porte plus
sur des normes de fabrication que sur une balance bénéfice-risque sanitaire
évaluée de façon approfondie. D'ailleurs, aux États-Unis, où l'autorité de
régulation (FDA) considère qu'un produit de comblement doit répondre aux mêmes
exigences qu'un médicament, six spécialités seulement sont autorisées!
Un marché
de 600.000 seringues par an
En France,
la situation est quasi similaire à celle des Anglais puisque ces produits
injectables utilisés en esthétisme ont aussi le statut de dispositif médical et
non de médicament. On en compte environ 110 sur le marché hexagonal.
Un marché en
constant développement et qui atteint déjà des proportions considérables. Lors
d'un point presse, il y a quelques mois, Jean-Claude Ghislain, directeur de
l'évaluation des dispositifs médicaux à l'Afssaps (Agence du médicament)
estimait le volume des ventes à 600.000 seringues par an.
Mais l'Afssaps, particulièrement en
alerte sur ce sujet, n'a jamais caché ses réticences, invitant praticiens et
patients à la plus grande prudence. Elle a même conduit, en 2009
et 2010, une campagne d'inspections, sur les sites des fabricants,
distributeurs et sous-traitants.
Car le
dossier (tests en laboratoire et chez l'animal) que les fabricants doivent
produire pour obtenir le sésame du marquage CE répond à des exigences européennes
(une directive de 1993 modifiée en 2007) qui ne suffisent pas à rassurer
l'agence française. Il y a quelques mois, l'Afssaps estimait ainsi que «les
données cliniques relatives aux produits injectables de comblement des rides
réalisées chez l'homme ne sont pas suffisantes pour garantir la sécurité
d'utilisation du produit».
Des
essais de courtes durée
Le problème
avec les dispositifs médicaux vient du fait que les études sont généralement
réalisées sur des petits effectifs: 150 personnes en général, là où un
médicament doit en rassembler plusieurs milliers pour pouvoir bénéficier d'une
autorisation de mise sur le marché (AMM). Par ailleurs, les essais durent à
peine quelques mois alors que certains effets indésirables peuvent apparaître
après plusieurs années.
Avec les
produits non résorbables ou lentement résorbables, on a ainsi pu observer
l'apparition de granulomes (induration définitive) jusqu'à dix ou quinze ans
après l'injection. D'ailleurs, le Pr Patrice Morel, chef du service de
dermatologie de l'hôpital Saint-Louis invitait l'année dernière dans Le Figaro
(nos éditions du 17 mai 2010) à la
plus extrême prudence.
Finalement,
les problèmes sont assez rares en France lorsque le geste est effectué par des
mains expertes avec des produits résorbables. En outre, une nouvelle circulaire
de la Direction générale de la santé précisant qui peut réaliser ce type
d'injection devrait bientôt achever de rassurer les consommateurs. Une première
version mal conçue avait été retoquée par le Conseil d'État l'an dernier.
Du côté de
l'Afssaps, on ne recense que quelques cas
d'interdiction de produits au cours des deux dernières années et l'agence
assure mener une investigation dès lors qu'un problème lui est signalé «quelle
que soit la source». Reste le problème des falsifications frauduleuses avérées
ou suspectées. L'année dernière, l'Afssaps a repéré des faux produits de
comblement de ride vendus sur Internet avec un faux marquage CE.
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