Dans son
"Manuel de lâcher prise", Paul-Henri Pion propose des exercices pour
venir en aide à tous les paralysés de l’existence. Cette année c'est décidé,
plus question de paniquer ! (Extraits)
Économiste
de formation, Paul-Henri Pion pratique les thérapies brèves structurées autour
de la lecture des interactions humaines et de la rhétorique du changement.
Qui n’a
jamais eu peur ? L’insouciant qui jamais n’a connu ce sentiment s’est fait
emporter par un danger ignoré et n’est plus là pour en parler. Car la peur
appartient à notre équipement de survie et se réveille pour nous prévenir que
nous risquons de perdre notre intégrité ou notre autonomie.
Elle nous
signale que quelque chose ou quelqu’un est en passe d’empiéter sur notre
territoire, de s’ingérer dans notre pré carré, de compromettre notre liberté de
mouvements ou, pire, d’attenter à notre vie. Cependant, la peur peut devenir un
frein à nos initiatives les plus banales, allant même jusqu’à nous handicaper
au quotidien. Comment procéder alors ? Nous allons voir qu’il est possible de
transformer sa peur en courage …
Le remède
: l’exploration des risques
Préférer ne
pas voir les conséquences de ce qui est redouté permet de se soulager dans
l’instant pour se retrouver handicapé à terme. Imaginer ce qui pourrait arriver
pour mieux chercher à ne pas y penser conduit à redouter l’action et à refuser
de voir les conséquences dommageables potentielles. Cette attitude conduit à se
laisser prendre par surprise par les circonstances de la vie, nous laissant
désemparés au milieu des dégâts, faute de nous y être préparé.
L’attitude
salvatrice dans une telle situation ressemble à celle d’un gestionnaire de
risques qui, sachant que des obstacles s’opposeront forcément au déroulement
des activités dont il doit favoriser le bon fonctionnement, recense toutes les
catastrophes qui pourraient s’enchaîner et compromettre ses projets, de façon à
anticiper sur leurs conséquences. D’expérience, il sait que les catastrophes
n’arrivent jamais seules et que de la bonne gestion de leurs facteurs
d’aggravation dépendra la possibilité ou non de poursuivre ou reprendre
l’activité perturbée.
Plutôt que
de décrire la conséquence immédiate à ce qui survient et que l’on ne veut pas
voir arriver, il convient de décrire l’enchaînement des catastrophes et
désagréments, des obstacles et difficultés qui ne manqueront pas de se succéder
si rien n’est prêt pour gérer les conséquences immédiates ou si ce qui est prêt
est défaillant. Il sera temps après, et seulement après, de se pencher
sur les mesures à prendre. Explorons et anticipons d’abord plutôt que
d’appliquer une solution a priori.
En procédant
de la sorte, celui qui explore les risques possibles découvre qu’ils ne sont
finalement pas si insurmontables que ça et, pour peu qu’il le fasse de façon
systématique et focalisée, il découvre que son esprit s’envole vers des sujets
moins désastreux, voire ébauche des réponses à ce qui paraissait insurmontable
et devait être évité absolument.
La peur
entretenue par le cercle vicieux peur-évitement-peur, devenu
évitement-peur-évitement, ouvre la porte à la peur d’avoir peur en sus de la «
simple » peur. Celui
qui a peur, s’il arrête d’éviter, a peur d’être envahi par la peur même s'il
constate qu’il en est déjà envahi et tributaire dans son quotidien ; d’autre
part, s’il va à la rencontre de ses peurs, ce qui est l’autre mouvement qui
s’offre à lui en plus de l’arrêt de l’évitement, il a peur de succomber à leur
rencontre. La mise en œuvre du traitement de l’évitement – ce n’est plus la
peur qui pose problème mais l’évitement – devra donc offrir un contexte
sécurisé dans lequel, si la peur survient, elle s’arrêtera au terme du « soin
». Par ailleurs, la peur est une émotion guidée par la préservation de la vie.
Il ne saura donc être question de faire encourir un quelconque risque à celui
qui a pris l’habitude d’éviter. Enfin, l’évitement, de réflexe originel, s’est
répandu à des contextes variés du quotidien de façon bien incontrôlable et
involontaire. Il y a lieu d’en tenir compte.
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