Pour la
première fois, des chercheurs israéliens ont réussi à transformer des cellules
humaines de peau en cellules de cœur et à les greffer à du tissu cardiaque de
rat.
Stade
préliminaire à la greffe de ces cellules aux patients eux-mêmes, cette
opération ouvre des perspectives pour soigner les personnes atteintes
d’insuffisance cardiaque.
EN QUOI
CONSISTE L’INNOVATION DES CHERCHEURS ?
Affections
courantes, l’insuffisance cardiaque et la crise cardiaque (infarctus du
myocarde) sont deux pathologies dues à une dégradation, voire une nécrose, des
cellules cardiaques musculaires, qui ne peuvent plus, alors, assurer les
contractions nécessaires à la propulsion du sang artériel (oxygéné) dans tout
l’organisme. Or ces cellules, les cardiomyocytes, ne se régénèrent pas beaucoup
naturellement. D’où l’idée de les remplacer par des cellules neuves à défaut
d’être totalement jeunes. C’est la thérapie cellulaire.
Dans un
travail publié dans l’European Heart Journal le 24 mai, les
chercheurs du Centre médical Rambam, au Technion de Haïfa (Israël), sous la
conduite du cardiologue Lior Gepstein, ont prélevé des cellules de la peau chez
deux hommes, âgés de 51 et 61 ans, souffrant d’insuffisance cardiaque.
Objectif : transformer ces cellules in vitro en cardiomyocytes
fonctionnels puis les greffer à du tissu cardiaque de rat afin de vérifier leur
parfaite aptitude à se contracter. Résultat : les cellules humaines ainsi
implantées ont pu battre de manière synchronisée.
Une fois
prélevées chez les patients, les cellules de la peau ont été modifiées par
l’injection de trois gènes, au moyen d’un virus particulier. Ces trois gènes
ont permis de remettre la pendule de ces cellules à zéro. Autrement dit, de les
reprogrammer et de les rendre, à l’instar de cellules souches embryonnaires,
pluripotentes, c’est-à-dire capables de donner naissance aux 200 types de
cellules qui constituent notre organisme.
Les cellules
induites par cette opération génétique ont ensuite été implantées dans du tissu
cardiaque frais afin qu’elles poursuivent leur différenciation. Au bout de
trente jours, plus rien ne permettait de distinguer les cellules issues des
patients de celles provenant de sujets en bonne santé. Ensuite, elles ont été
transplantées dans du tissu cardiaque de rat. Les deux lignées de cellules
n’ont alors eu aucun problème à se synchroniser et à battre en rythme. « Le
principe est donc validé : c’est ce qu’on appelle une preuve de
concept » , indique Jean-Marc Lemaître, biologiste spécialiste de
ces cellules à Montpellier (Inserm, CNRS, université), qui rappelle qu’une
démonstration analogue a déjà été faite avec des cellules souches pluripotentes
embryonnaires.
Elle
permettrait à la fois de réimplanter les propres cellules d’un patient en
évitant les risques de rejet de greffe, et de disposer d’une source importante
de cardiomyocytes. Reste, toutefois, à produire plus de cellules cardiaques
(les chercheurs en ont obtenu quelques millions mais il en faudrait un milliard
pour remplacer celles détruites lors d’un infarctus), et plus rapidement. En
effet, comme il faut deux semaines pour reprogrammer les cellules de la peau en
cellules souches induites, on est encore loin des délais d’une transplantation
d’urgence. Les chercheurs comptent commencer les premiers essais cliniques dans
une dizaine d’années.
DENIS
SERGENT
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