TEHERAN (Reuters) - Fermer le détroit d'Ormuz, comme l'Iran
menace de le faire, est "plus facile que de boire un verre d'eau", a
assuré mercredi le chef de la marine iranienne qui mène depuis samedi des
manoeuvres dans cette région où transite un tiers du pétrole transporté par
mer.
"Fermer le détroit d'Ormuz est vraiment facile pour
l'armée iranienne (...) Comme le disent les Iraniens, c'est plus facile que de
boire un verre d'eau", a dit Habibollah Sayyari à la chaîne iranienne en
langue anglaise, Press TV.
"Mais pour le moment nous n'avons pas besoin de le
fermer puisque nous contrôlons la mer d'Oman et son trafic", a-t-il
ajouté.
Quelques heures plus tard, le commandement de la Ve Flotte
américaine, basée au Bahreïn, faisait savoir qu'un blocage du détroit d'Ormuz
"ne serait pas toléré".
"Le libre passage des biens et des services par le
détroit d'Ormuz est vital pour la prospérité de la région et du monde", a
souligné un porte-parole de la Ve Flotte à Manama. "Quiconque menace la
liberté de navigation dans un détroit international se met clairement en dehors
de la communauté des nations et une interruption du trafic ne sera pas tolérée."
Environ un tiers du pétrole transporté par voie maritime a
transité par le détroit en 2009, selon l'Agence américaine d'Information sur
l'Energie (EIA) et les équipages de l'US Navy affectés à la sécurité de la
zone.
L'essentiel du pétrole exporté par l'Arabie saoudite,
l'Iran, les Emirats arabes unis, le Koweït et l'Irak ainsi que la
quasi-totalité du gaz naturel liquéfié en provenance du Qatar emprunte cette
voie de 6,4 km de large entre les rives du sultanat d'Oman et les côtes
iraniennes.
La tension est montée d'un cran entre l'Iran et l'Occident
depuis la publication début novembre du dernier rapport de l'Agence
internationale de l'énergie atomique (AIEA) selon lequel Téhéran aurait bien
cherché à se doter de l'arme atomique et pourrait continuer à le faire.
Téhéran assure que son programme nucléaire est destiné
uniquement à produire de l'électricité.
SANCTIONS
L'Iran a affirmé mardi que le pétrole cesserait de transiter
par le détroit d'Ormuz si les exportations iraniennes d'hydrocarbures devaient
faire l'objet de sanctions internationales.
L'Union européenne a renforcé ses sanctions contre l'Iran le
1er décembre en ajoutant 180 noms de personnalités et d'entités à la liste des
compagnies déjà visées. L'imposition d'un embargo sur le pétrole iranien est
actuellement à l'étude à Bruxelles.
"Si des sanctions étaient imposées (contre les
exportations iraniennes d'hydrocarbures), cela créerait une situation anormale
et pourrait ouvrir la voie à n'importe quelle action. Si le détroit d'Ormuz
était fermé, aucun pétrole du Golfe ne serait exporté. La situation serait
difficile pour tout le monde", a prévenu le gouverneur iranien de
l'Organisation des pays exportateurs de pétrole (Opep), Mohammad Ali Khatibi.
"Le marché pétrolier tel qu'il fonctionne actuellement
satisfait tout le monde, pourquoi certains pays veulent-ils changer la
situation actuelle?", a-t-il ajouté.
"Nous espérons vraiment que ce pire scénario ne se
produira pas parce qu'il nuirait à tout le monde, nous voulons que les choses
restent stables pour les consommateurs, les producteurs et les
investisseurs."
IMPACT DES SANCTIONS
En réponse aux menaces iraniennes, la France a appelé
mercredi l'Iran à respecter la liberté de navigation.
"Comme sur les droits de l'homme et la prolifération
nucléaire, nous appelons les autorités iraniennes au respect du droit
international et en particulier de la liberté de navigation dans les eaux
internationales et les détroits", a déclaré Bernard Valero, porte-parole
du ministère des Affaires étrangères.
"Le détroit d'Ormuz est un détroit international. En
conséquence tous les navires, quel que soit leur pavillon, bénéficient du droit
de passage en transit, conformément à la Convention des Nations Unies sur le
droit de la mer adoptée en 1982 et au droit international coutumier de la
mer", a-t-il ajouté dans un communiqué.
Selon un rapport de l'AIEA publié début décembre, l'Iran
pourrait perdre près d'un quart de ses capacités de production pétrolière en
cas de renforcement des sanctions internationales.
En déplacement dans la province d'Ilam (ouest) mercredi, le
président iranien Mahmoud Ahmadinejad a une nouvelle fois affirmé que l'Iran ne
céderait pas aux pressions internationales.
"Nous ne céderons pas à la pression exercée pour que
nous abandonnions nos droits. Le peuple iranien ne renoncera pas à son droit (à
la technologie nucléaire), même d'un iota, en raison des pressions", a dit
le chef de l'Etat.
Certains responsables pétroliers iraniens ont toutefois
indiqué que les sanctions internationales frappaient de plein fouet le secteur
énergétique national qui dépend essentiellement de l'investissement étranger.
Si les quatre volets de sanctions adoptés par les Nations
unies n'interdisent pas l'achat de pétrole iranien, la plupart des compagnies
pétrolières internationales ont suspendu leur transactions avec l'Iran.
Avec Yves Clarisse à Paris et Amena Bakr à Dubaï, Clément
Guillou et Marine Pennetier pour le service français
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