Aung San Suu
Kyi devant un parterre de journalistes français, hier, à Rangoun, la capitale
de Birmanie. L'opposante historique à la junte militaire est au centre de
toutes les attentions.
Reuters
Aung San
Suu Kyi, décorée de la Légion d'honneur, hier, par Alain Juppé, joue le jeu de
l'ouverture démocratique. Candidate aux élections du 1er avril, elle
pourrait entrer au gouvernement.
Rangoun.
Correspondance
Avec sa
tenue traditionnelle, une fleur blanche dans les cheveux, Aung San Suu Kyi,
66 ans, a des allures d'éternelle jeune fille. Elle s'exprime dans un bon
français, appris sur cassettes pendant sa longue captivité. « J'ai
dû réviser toute la nuit pour vous parler », déclare-t-elle,
souriante, à un parterre de journalistes.
Décorée,
hier, de la Légion d'honneur par le ministre des Affaires étrangères, Alain
Juppé, en visite en Birmanie, la « Dame de Rangoun » a décidé de se
présenter à des législatives partielles, le 1er avril. « Nous
avons des élections à gagner et une lourde tâche à accomplir », dit-elle.
Sa formation, la Ligue nationale démocratique (LND), s'est fait enregistrer en
vue de ce scrutin. Il pourvoira une quarantaine de sièges vacants.
La junte
militaire qui avait volé sa victoire à la LND en 1990 et placé Aung San Suu Kyi
en résidence surveillée, s'est auto dissoute au printemps de 2011. Pour la
première fois en soixante ans, un « civil » dirige le pays. Le
président Thein Sein, un général en retraite, multiplie les gestes, libérant
des prisonniers d'opinion (651 vendredi), discutant avec les guérillas
séparatistes et relâchant l'étreinte sur la presse. « J'ai
confiance dans sa bonne volonté et dans le fait que ces élections seront justes
et démocratiques », affirme Aung San Suu Kyi. Elle
n'exclut pas d'accepter un poste au gouvernement.
À ceux,
encore méfiants, qui le lui déconseillent, elle répond avec fermeté : « Il
est très dangereux de se croire au-dessus du processus démocratique. Je vais me
soumettre aux urnes avec humilité. »
« Elle
a tout sacrifié pour nous »
Depuis la
libéralisation, les portraits d'Aung San Suu Kyi sont partout dans Rangoun. En
posters, en fond d'écran d'ordinateurs, sur les téléphones portables. Les
Birmans l'appellent Amè, mère, « parce qu'elle
a tout sacrifié pour nous, ses enfants »s'enflamme Dhourak,
chauffeur de taxi à Rangoun.
Les
élections sont-elles gagnées d'avance ? « Le problème
avec la LND, c'est que sans Aung San Suu Kyi, tout s'écroule. Elle leur tient
lieu de programme. Ils doivent s'entourer de jeunes pour répondre aux vraies
préoccupations : ce que veulent les Birmans, c'est d'abord manger à
leur faim et envoyer leurs enfants à l'école »,avance Nyein
Chan, 34 ans, du collectif Generation Wave, qui promeut la démocratie
auprès de la jeunesse.
Les
élections du 1er avril seront scrutées à la loupe par les pays
occidentaux : « C'est une étape essentielle pour la
levée des sanctions économiques », a déclaré Alain Juppé.
Les États-Unis ont décidé, samedi, de renvoyer un ambassadeur en Birmanie,
vingt-deux ans après l'avoir retiré.
Carol ISOUX.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire