dimanche 15 janvier 2012

L'opposante birmane dit « banco » aux généraux


Aung San Suu Kyi devant un parterre de journalistes français, hier, à Rangoun, la capitale de Birmanie. L'opposante historique à la junte militaire est au centre de toutes les attentions.
Aung San Suu Kyi devant un parterre de journalistes français, hier, à Rangoun, la capitale de Birmanie. L'opposante historique à la junte militaire est au centre de toutes les attentions.
Reuters
Aung San Suu Kyi, décorée de la Légion d'honneur, hier, par Alain Juppé, joue le jeu de l'ouverture démocratique. Candidate aux élections du 1er avril, elle pourrait entrer au gouvernement.
Rangoun. Correspondance
Avec sa tenue traditionnelle, une fleur blanche dans les cheveux, Aung San Suu Kyi, 66 ans, a des allures d'éternelle jeune fille. Elle s'exprime dans un bon français, appris sur cassettes pendant sa longue captivité. « J'ai dû réviser toute la nuit pour vous parler », déclare-t-elle, souriante, à un parterre de journalistes.
Décorée, hier, de la Légion d'honneur par le ministre des Affaires étrangères, Alain Juppé, en visite en Birmanie, la « Dame de Rangoun » a décidé de se présenter à des législatives partielles, le 1er avril. « Nous avons des élections à gagner et une lourde tâche à accomplir », dit-elle. Sa formation, la Ligue nationale démocratique (LND), s'est fait enregistrer en vue de ce scrutin. Il pourvoira une quarantaine de sièges vacants.
La junte militaire qui avait volé sa victoire à la LND en 1990 et placé Aung San Suu Kyi en résidence surveillée, s'est auto dissoute au printemps de 2011. Pour la première fois en soixante ans, un « civil » dirige le pays. Le président Thein Sein, un général en retraite, multiplie les gestes, libérant des prisonniers d'opinion (651 vendredi), discutant avec les guérillas séparatistes et relâchant l'étreinte sur la presse. « J'ai confiance dans sa bonne volonté et dans le fait que ces élections seront justes et démocratiques », affirme Aung San Suu Kyi. Elle n'exclut pas d'accepter un poste au gouvernement.
À ceux, encore méfiants, qui le lui déconseillent, elle répond avec fermeté : « Il est très dangereux de se croire au-dessus du processus démocratique. Je vais me soumettre aux urnes avec humilité. »
« Elle a tout sacrifié pour nous »
Depuis la libéralisation, les portraits d'Aung San Suu Kyi sont partout dans Rangoun. En posters, en fond d'écran d'ordinateurs, sur les téléphones portables. Les Birmans l'appellent Amè, mère, « parce qu'elle a tout sacrifié pour nous, ses enfants »s'enflamme Dhourak, chauffeur de taxi à Rangoun.
Les élections sont-elles gagnées d'avance ? « Le problème avec la LND, c'est que sans Aung San Suu Kyi, tout s'écroule. Elle leur tient lieu de programme. Ils doivent s'entourer de jeunes pour répondre aux vraies préoccupations : ce que veulent les Birmans, c'est d'abord manger à leur faim et envoyer leurs enfants à l'école »,avance Nyein Chan, 34 ans, du collectif Generation Wave, qui promeut la démocratie auprès de la jeunesse.
Les élections du 1er avril seront scrutées à la loupe par les pays occidentaux : « C'est une étape essentielle pour la levée des sanctions économiques », a déclaré Alain Juppé. Les États-Unis ont décidé, samedi, de renvoyer un ambassadeur en Birmanie, vingt-deux ans après l'avoir retiré.
Carol ISOUX.

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